18 janvier 2013

Interview d'Alexandre Rolla



Rencontre avec Alexandre Rolla, professeur d'Histoire de l'Art en Licence Professionnelle METI (Métiers de l'Exposition et Technologies de l'Information) ainsi qu'à l'Ecole Supérieure d'Arts et Médias de Caen-Cherbourg. 



« À dessin »

Durant de nombreux siècles, les mots dessin et dessein ont tous les deux porté les mêmes sens. Ce n’est qu’entre le XVII ème et le XVIII ème siècle qu’ils se sont séparés de plus d’une simple lettre. La langue italienne, continue, aujourd’hui encore à ne faire aucune distinction entre le geste et l’intention. Il disegno signifie, de la même manière le dessin et le dessein, la forme et l’ambition.

C’est donc « à dessin » que  l’exposition RE : propose une réflexion sur le dessin contemporain et surtout sur les véhicules innombrables que celui-ci emploie pour se faire jour, signifiant et autonome.

De nouveau, il s’agit de gommer la distance entre les projets, les techniques et les résultats. De l’original à la copie, voire même la photocopie, l’exposition RE : traque tous les moyens que le dessin utilise pour faire œuvre.

À l’occasion du Salon de 1859, Charles Baudelaire, évoquant la photographie, écrit : « Il faut donc qu’elle rentre dans son véritable devoir, qui est d’être la servante des sciences et des arts, mais la très humble servante, comme l’imprimerie et la sténographie, qui n’ont ni créé ni suppléé la littérature (...) »

Longtemps, pour l’histoire de l’art, le dessin ne « sert » que d’ébauche, d’esquisse, ou de témoignage et de méthodologie pour un projet. Il n’est que « l’humble serviteur » des activités plastiques, plus nobles et plus définitives que sont alors la peinture et la sculpture. Il  se libère désormais, intégrant parfois même ces contraintes historiques comme de nouveaux vecteurs de liberté. Le dessin peut aujourd’hui librement jouer et se jouer de la peinture et de la sculpture, comme il le peut tout aussi bien de la photographie, l’imprimerie, la sténographie, les sciences et les arts.

Il n’y a plus de différences entre la forme, les formes et les intentions et tout concourt à faire évoluer cet art vers de nouveaux territoires d’expressions.

C’est ainsi que l’exposition RE:  réédite, réconcilie, reproduit, réinvente, révèle, retranscrit, rétablit, rejoint, replie, republie, redéploie, réintroduit, reconduit, réenvisage, redécouvre…

Dans cette dynamique, l’exposition prolonge un partenariat initié l’an dernier entre l’ISBA, Toshiba House et l’Université de Franche-Comté. Après l’exposition Deuxième main de Benjamin Hochart, en février 2012 à Toshiba House comme point de départ, après Permutations, une soirée de la plateforme Roven, à l’ISBA en avril 2012, comme trait d’union, l’exposition RE : développe et enrichit cette réflexion, embrassant l’ensemble des vecteurs de production, d’exposition, de diffusion, d’édition et de médiation utilisés par le dessin aujourd’hui.

Alexandre Rolla